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Une Politique nationale de l’artisan pour favoriser la mise en marché des produits locaux.

Président du groupe des Emporiums, le professeur Normand Bourgault dépose les deux tomes du rapport sur la mise en marché des produits de spécialité

Normand Bourgault, professeur de marketing au Département des sciences administratives de l’Université du Québec en Outaouais, est spécialiste de la mise en marché des réseaux de distribution et de l’agroalimentaire. Il y a 3 ans, monsieur Bourgault a été mandaté par le ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire (MAMROT) afin de diriger un groupe de recherches visant à proposer des solutions pour permettre aux consommateurs d’avoir accèsaux produits de spécialité de leurs régions et de l’ensemble du Québec. « L’idée du mandat, c’était de trouver des moyens de faciliter la mise en marché des produits qui sont fabriqués dans les régions du Québec. Des produits de spécialités, ce sont autant des produits agroalimentaires que d’art ou d’artisanat ou que des produits forestiers non ligneux tels les champignons, les fines herbes sauvages, les huiles essentielles ou les exsudats des arbres qui peuvent être utilisés dans les parfums », d’expliquer le professeur Bourgault.

Pour amorcer le travail, le groupe des Emporiums, composé de « quatorze personnes remarquables par leur implication et leur dévouement », de dire monsieur Bourgault, a préparé un devis de recherche couvrant tous les aspects de la production et de la mise en marché des produits de spécialité. Trois équipes de chercheurs ont couvert toutes les régions du Québec afin d’interroger quelque 230 producteurs transformateurs dans le cadre de la recherche. De plus, divers organismes clés impliqués dans la distribution, dont la société des alcools du Québec et l’Association des marchés publics du Québec, ont également été mis à contribution dans la recherche de solutions. Le groupe de travail a déposé au ministre un rapport qui contient 13 recommandations, dit-il, « avec les pistes qu’ont emprunté les producteurs et qui constituent des modèles à suivre ainsi que des orientations pour l’avenir ».

En fait, le professeur Bourgault regroupe en quatre catégories les recommandations.

Une Politique nationale de l’artisan

La première invite le gouvernement du Québec à se doter d’une politique nationale de l’artisan. Cette politique favoriserait le regroupement d’artisans en associations. Les membres pourraient utiliser le terme « artisan » alors que les autres producteurs qui ne satisfont pas ces critères pourraient toujours produire, mais sans pouvoir qualifier leur produit d’artisan. « Notre objectif, indique le professeur Bourgault, est de structurer le secteur en incitant les producteurs à se regrouper. L’appellation réservée produit artisanal constituerait ainsi une assurance de qualité pour les acheteurs ». La définition d’artisanale pourrait qualifier toute entreprise qui compte moins d’une quinzaine d’employés et où le propriétaire participe à toutes les étapes de la production. Monsieur Bourgault insiste sur le fait que le qualificatif « artisanal deviendrait l’équivalent d’une marque de commerce. L’utiliser représenterait pour le producteur l’équivalent d’une campagne de marketing totalement gratuite pour lui ! »

La difficulté des producteurs à mettre leurs produits en marché vient du fait qu’ils ne sont pas reconnus, explique le professeur Bourgault. Les qualités distinctives de leurs produits sont difficiles à démontrer lorsque les consommateurs se retrouvent devant des étalages de magasin. « Il faut permettre à l’artisan d’avoir une marque de commerce qui va garantir aux consommateurs la qualité et le mode de production de ce produit et c’est ce que l’appellation produit artisanal peut faire pour eux ».

Des produits de proximité

Normand Bourgault indique que tous les membres du groupe de travail sont arrivés à la conclusion que l’expression produit local ne peut pas être utilisée pour décrire les produits qui sont transformés et mis en marché près de leur lieu de vente. « Par exemple, dit-il, un producteur de mayonnaise décrit son produit comme local parce que fabriqué avec des œufs du Québec et de l’huile de canola de l’Alberta. C’est tout de même plus de 3 000 kilomètres qui séparent le lieu d’origine de ces deux composantes! » Le groupe de travail propose plutôt de reconnaître une appellation produit de proximité pour ce qui est transformé et vendu dans un rayon de 150 kilomètres du lieu de production ou dans sa région touristique ou administrative du Québec. Monsieur Bourgault ajoute que « pour le groupe de travail, il est incompréhensible qu’un produit comme un vin élaboré par exemple à Gatineau ne puisse pas être vendu dans un restaurant ou un magasin d’alimentation à proximité alors qu’on peut vendre un vin du Chili facilement ». Il explique que « les règles du Commerce international imposent au Québec un traitement égal aux entreprises québécoises et étrangères. Mais, et c’est là la beauté de notre proposition, la règle de proximité permet de favoriser toute entreprise, locale ou étrangère, qui produit du vin dans un rayon de 150 kilomètres de son lieu de vente. Si un vigneron chilien veut vendre du vin de proximité au Québec, il n’aura qu’à établir un vignoble tous les 150 kilomètres sur le territoire québécois comme le font les vignerons du Québec! » L’application de la règle du produit de proximité permettrait aux produits québécois d’être vendus à meilleur prix que ce que peut faire actuellement la SAQ. Selon le professeur Bourgault, le concept de produit de proximité impose que le produit ne soit distribué que dans un rayon de 150 kilomètres de son lieu de production. Et s’il est vendu plus loin, il n’aura plus ce traitement particulier.

Des règles de transparence pour la grande distribution

Le rapport du groupe travail présidé par le professeur Bourgault fait également ressortir l’importance d’obtenir auprès des grands distributeurs qu’ils écrivent et rendent public leur politique d’achat et de vente de produits locaux, artisans et de proximité. Que ce soit les supermarchés d’alimentation, les grandes quincailleries, la Société des alcools du Québec ou les chaînes de pharmacies, toutes se targuent d’appuyer la production québécoise. Cependant, aucune n’a fait connaître ces procédures internes qui favoriseraient l’achat québécois. Le groupe de travail considère qu’ils devraient écrire et faire connaître leur politique d’appui aux produits québécois. Ces politiques devraient minimalement qualifier de produit local un produit du Québec, décrire comment est incluse dans ses processus d’affaires une approche « produit de proximité, produit local et produit artisan » permettant un accès équitable aux tablettes à la production québécoise.

Une appellation réservée pour la distribution québécoise

Le groupe de travail s’est aussi penché sur la possible reconnaissance des lieux de vente qui font des efforts particuliers pour commercialiser des produits québécois. Il propose de réserver le terme emporium à cet effet. Ce terme valorisant qualifierait un lieu réel ou virtuel (site web) où ce qui est vendu provient essentiellement d’une région (emporium régional) ou du Québec (emporium national). Ainsi, il pourrait être établi qu’un commerçant dont le chiffre d’affaires provient de plus de 80 % de produits régionaux ou québécois peut s’afficher comme emporium. « L’objectif final de cette appellation, de dire le professeur Bourgault, est de faciliter les achats des consommateurs et des touristes qui veulent consommer local ou régional. Lorsqu’ils verraient un commerce qualifié d’emporium, ils auraient la garantie de la provenance des produits de cet établissement. Et, surtout, de renchérir monsieur Bourgault, ce ne serait pas une simple tablette ou un meuble fermé à clé sur une grande surface de vente! ».

Les deux tomes du rapport sont disponibles sur le site Internet du MAMROT, à l’adresse suivante : http://www.mamrot.gouv.qc.ca/developpement-regional-et-rural/ruralite/groupes-de-travail/emporiums-du-quebec/

Membres exécutifs :

  • Normand Bourgault, professeur de marketing, Université du Québec en Outaouais — Président.
  • Christine Gosselin, conseillère, Direction du développement rural et régional (MAMROT) — Secrétariat général.
  • Suzie Loubier, directrice générale, Association des centres locaux de développement du Québec (ACLDQ) et représentante de l’organisme porteur.
  • Éric Martel, chargé de projet.

Représentants des partenaires de la ruralité :

  • Sylvie Bellerose, conseillère, Solidarité rurale du Québec.
  • Henri Cloutier, maire, Union des municipalités du Québec (2008-2009)1.
  • Jean Fortin, maire, Union des municipalités du Québec (2010).
  • Agnès Dupriez, conseillère, Fédération québécoise des municipalités (2008-2010).
  • Érika Desjardins-Dufresne, conseillère, Fédération québécoise des municipalités (2010).

Membres experts :

  • Jude Bonneau, directeur général, Magasin Coop, Montmagny.
  • Guy Langlais, professeur, CÉGEP de La Pocatière, Biopterre. (2008).
  • Geneviève O’Gleman, nutritionniste et journaliste, Nutrinova.
  • Bernard Racine, conseiller en aménagement du territoire, MAPAQ.
  • Serge Demers, directeur général, Conseil des métiers d’art du Québec.

1, Membre du Groupe de travail durant cette période.

 

 

 

 

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