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Les défis économiques de Barack Obama

Deux semaines après l'euphorie résultant de l'élection de Barack Obama à la présidence américaine, on parle de plus en plus des défis qui attentent le nouveau président élu et le moins que l'on puisse dire est qu'ils sont colossaux. Dès janvier, il devra conjuguer avec deux guerres actives, des menaces constantes à la sécurité nationale mais surtout, à la possibilité de la plus importante crise économique depuis la Grande Dépression des années 30.

Jusqu'à maintenant, l'effort des autorités monétaires et fiscales visait essentiellement deux objectifs: (1) renflouer certaines institutions financières en difficulté (Bear Stearns, AIG) et (2) renforcer le capital des banques par l'achat d'une foule de produits financiers dont personne ne veut; c'est ce qu'on a appelé le plan Paulson. Bien que ces diverses mesures se soient avérées efficaces pour éviter la faillite du système financier en redonnant une certaine dose de confiance aux investisseurs, les effets sur l'économie réelle sont loin de s'être estompés. Au contraire, on voit poindre de plus en plus des menaces de récession pour l'économie mondiale et plusieurs prétendent même que l'économie américaine serait déjà en récession.

Face à un ralentissement marqué de l'économie, les autorités publiques ont plusieurs outils à leur disposition. D'une part, un assouplissement de la politique monétaire visant l'ajout de liquidité dans l'économie pourrait aider à relâcher la contrainte budgétaire de certains agents et ainsi stimuler l'économie. Cependant, on doit mentionner que les ménages américains sont déjà surendettés et toute nouvelle incitation à consommer pourrait s'avérer totalement inutile. Comme le disait si bien J.M. Keynes, ce n'est pas parce qu'on amène un cheval à l'abreuvoir qu'on peut le forcer à boire. De plus, avec un taux directeur à 1%, la marge de manœuvre pour des baisses supplémentaires est grandement réduite et dans un tel contexte, on peut dire que la politique monétaire n'est plus réellement efficace.

D'autre part, au niveau de la politique fiscale, il s'agirait de mettre en place des mécanismes de stimulation de la demande agrégée capables de relancer l'économie. Parmi l'ensemble des politiques proposées—hausse des dépenses publiques, baisse des taxes et impôts, hausse des transferts—, une hausse des dépenses publiques offre la meilleure garantie de succès pour une relance économique. En effet, comme les ménages américains sont déjà surendettés, il n'est pas du tout évident qu'une politique d'allègement fiscal aurait un effet stimulateur sur l'économie, car une grande partie des montants alloués par une telle politique pourraient être épargnés et serviraient plutôt à une réduction de la dette privée.

Une hausse des dépenses publiques offrirait donc une meilleure garantie que les montants alloués pour la relance soient bel et bien injectés dans l'économie. Et ce ne sont pas les besoins qui manquent avec un secteur de l'automobile sur le bord du gouffre et un régime public de santé plutôt déficient. Toutefois, avec un déficit budgétaire qui s'élève à environ 5% du produit intérieur brut, les défis fiscaux s'avèrent énormes pour Barack Obama. Mais sa crédibilité et la majorité démocrate dans les deux chambres lui donneraient néanmoins une marge de manœuvre suffisante pour imposer des choix cruciaux mais difficiles au peuple américain.

 

 

David Tessier

par David Tessier, professeur

Département des sciences administratives